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Le Parti libéral du Québec (PLQ) et le Parti québécois (PQ) ont reçu une mauvaise nouvelle lundi dernier lors d’une élection partielle tenue dans la circonscription de Marie-Victorin, sur la rive sud de Montréal. Depuis 40 ans, à une brève exception près, le siège était détenu par le PQ ; lundi, la circonscription est passée aux mains de la Coalition Avenir Québec (CAQ). Pour leur part, les libéraux ont terminé en cinquième position avec à peine sept pour cent des voix, leur plus mauvais score jamais enregistré dans la circonscription.
Il semble que l’existence même des deux partis, qui ont dominé la politique de la province pendant un demi-siècle, soit menacée. Le PQ pourrait disparaître parce qu’il s’accroche obstinément à son idéologie séparatiste ; le soutien au PLQ s’étiole parce que le parti s’est éloigné de ses principes fondamentaux.
La victoire est importante pour le gouvernement dirigé par François Legault, car elle survient malgré la révélation de faits troublants concernant la gestion de la pandémie de COVID-19 par la CAQ. Le Parti Québécois a eu la chance de trouver un candidat connu et expérimenté, Pierre Nantel, qui avait représenté cette région, en tant que député néo-démocrate, à la Chambre des communes. Le PQ semblait donc en bonne position pour conserver la circonscription, un résultat qui aurait redonné le moral au parti, cinq mois avant les élections générales du 3 octobre.
Nantel réussit à maintenir la part du vote du PQ (30 %), mais il est devancé par Shirley Dorismond de la CAQ (35 %). Le fait que le vote du PQ ne se soit pas effondré a été considéré comme un signe positif par les commentateurs séparatistes. Pourtant, la défaite, ajoutée aux chiffres inquiétants de plusieurs sondages, est décidément une mauvaise nouvelle pour le parti désormais dirigé par un jeune avocat dynamique, Paul St-Pierre Plamondon.
Plamondon est déterminé à remettre l’indépendance sur l’écran radar des Québécois, mais pour le moment du moins, la stratégie ne fonctionne pas. Non seulement le pourcentage de Québécois favorables à la souveraineté a diminué, mais ceux qui croient encore au rêve de René Lévesque pensent que cela ne se produira pas de sitôt. Par conséquent, une partie importante du vote péquiste a dérivé vers la CAQ nationaliste.
Circonscription nationaliste, majoritairement francophone et plus pauvre que la moyenne, Marie-Victorin n’a jamais été un territoire amical pour les libéraux provinciaux. Aux élections générales de 2018, son candidat a terminé en quatrième position avec 15,2 % des voix. Comment l’opposition officielle pourrait-elle faire pire ? Elle vient de le faire. Lundi soir, le candidat libéral a terminé derrière le Parti conservateur marginal du Québec.
Le leader du Parti conservatieur, Éric Duhaime, commence à être plus connu dans les couloirs politiques. Après une carrière de commentateur à la radio, Duhaime est de retour en politique à la tête du Parti conservateur du Québec, qui gagne en popularité sous son mandat. Au cours de sa première année, le nombre de membres est passé de 600 à 57 000 et son parti a dépassé les libéraux dans l’élection partielle sur la Rive-Sud de Montréal, avec plus de 10 % des voix.
Il s’est également avéré être une épine dans le pied du premier ministre François Legault, notamment en ce qui concerne les restrictions liées à la pandémie qui ont été particulièrement sévères au Québec. Duhaime, qui a annoncé son intention de se présenter dans la circonscription de Chauveau, au nord de Québec, aux élections provinciales de cet automne, a également réussi à attirer des centaines de personnes lors d’un récent centre communautaire de la région au début d’avril, plusieurs d’entre elles ayant dû écouter son discours à l’extérieur en raison du manque d’espace. Son popularite est une autre problème pour les autres parties.
Le Parti Québécois ne détient plus que six des 125 sièges de l’Assemblée nationale, et certains prédisent qu’il perdra la plupart de ces sièges en octobre. Nous verrons : la mort du PQ a déjà été annoncée auparavant ; chaque fois, le parti a rebondi.
Ce piètre résultat pourrait être considéré comme une mise en accusation de la stratégie de Dominique Anglade visant à améliorer la position de son parti auprès de la population francophone de la province en se tournant vers le côté nationaliste et la gauche de l’offre politique. Les résultats dans Marie-Victorin montrent que la tactique de la chef n’a pas encore réussi à attirer les francophones. De plus, le positionnement nationaliste des Libs sur la question linguistique a provoqué la colère de la population non-francophone, qui se sent délaissée par le parti qui était considéré par la plupart comme le défenseur acharné de leurs intérêts et de leurs droits.
Le PLQ ne disparaîtra pas, car la plupart des anglophones et des allophones voteront encore pour les libéraux aux prochaines élections générales ; cela signifie que plusieurs circonscriptions de la région de Montréal resteront aux mains des libéraux. Ce qui semble probable, par contre, c’est que le PLQ redevienne le parti des Anglais “, avec un appui insignifiant de la majorité francophone de la province. Le parti pourrait même perdre son statut d’Opposition officielle.
Actuellement, les libéraux ont l’air de paniquer. Sur la question de la langue, ils ont soudainement fait marche arrière par rapport à un amendement qu’ils avaient eux-mêmes proposé au projet de loi 96, dans une tentative de paraître aussi nationalistes que la CAQ. Le chef de Québec Solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, a bien résumé l’opinion de nombreux Québécois concernant l’état actuel des libéraux provinciaux, autrefois puissants.
À quelques mois des élections générales, les libéraux provinciaux et le Parti québécois trouveront-ils le moyen de retrouver leur gloire passée ? Probablement pas. Ils doivent maintenant se concentrer sur ce que nous appelons “sauver les meubles”, c’est-à-dire réduire leurs pertes.